Un article du Monde de ce soir est très superficiel et imprécis dans son analyse : l'essentiel y est bien, puisque le PS est considéré comme le plus respectueux de la loi pour la présentation des candidat-e-s. Mais l'interprétation des chiffres en général mérite d'être approfondie.
Nombre (à confirmer) des candidatures déposées hier pour les législatives de juin : 7550 (contre 8456 en 2002), soit au moins 13 par siège à pourvoir (contre près de 15 en 2002). Sur ce total de candidat-e-s, on compterait 45 % de femmes en 2007, au lieu de 38,5 % il y a 5 ans : très bien. Mais que dire de l'explication donnée à cette augmentation ? ce n'est pas la loi de 2000, puisqu'elle était déjà en vigueur au scrutin précédent !
Cette loi a été votée en juin 2000, grâce à la révision de la Constitution de 1999, les deux étant menées par le gouvernement Jospin : elle oblige les partis politiques à présenter des candidats et candidates en nombre égal. Ce n'est pas une obligation comparable à celle qui s'applique aux scrutins par listes à la proportionnelle, où la sanction est beaucoup plus radicale et efficace (à défaut de parité, la liste candidate est nulle, et ne peut être enregistrée en préfecture). Dans le cas des législatives, il n'y a qu'une sanction financière ; une partie du financement public aux partis politiques est soustraite de la somme allouée par l'État. Le Monde omet de dire que les sommes indiquées dans l'article sont annuelles : il faut donc multiplier par 5 les millions perdus par l'UMP, le PS et l'UDF depuis 2002 !
Dans ce cas, comme toujours, les plus pauvres sont plus regardants ; et les plus pauvres sont les partis qui ont le moins d'élus. Les petits partis veillent donc toujours à respecter la parité, 50/50 pour ne pas perdre un centime d'euro. Mais il faut bien reconnaitre qu'ils ont souvent peu de chances d'avoir des élus - hommes ou femmes...
À l'inverse, les plus grand partis ont préféré perdre de l'argent en 2002, plutôt que d'avoir assez de femmes candidates : les places sont chères ! En 2007 les chiffres montrent qu'il y a un sursaut salvateur.
Et la différence est au Parti socialiste : dès 2004, les commissions femmes ont commencé une analyse des circonscriptions gagnables, et ont recensé toutes les candidates possibles. Pour la première fois, la commission nationale des élections a accepté d'intégrer une féministe bien décidée : et Bruno Le Roux dit aujourd'hui ne pas regretter d'avoir fait ce travail avec Yvette Roudy, négociatrice tenace et porte-voix d'un travail collectif dirigé par Geneviève Couraud. Chacune des 577 circonscriptions a été analysée, et des candidatures ont été proposées, discutées, acceptées. On passera sur les conflits, inévitables (céder sa place à une femme, c'était bon par galanterie, mais personne ne demande que la galanterie soit un fondement de la politique ni du socialisme !).
Il faut bien convenir que le résultat obtenu, 48 % de candidates, représente un net progrès, puisque bon nombre sont "gagnables" (dans le contexte politique général bien sûr). Mais aussi que c'est une moyenne globale : si un département présente 9 femmes pour 12 sièges, cela masque que dans d'autres départements l'éléphant local a virilement refusé d'en présenter aucune (qui veut des noms ?!). Ne chipotons pas...
Dans le camp du nouveau Président, c'est tout autre chose : non contents d'avoir perdu près de 25 millions d'€ depuis 2002, on récidive. Le riche parti (qui économise sur le Fouquet's et le yacht en cadeaux) peut se permettre de rester majoritairement mâle : la sanction financière, qu'une nouvelle loi bâclée en 2006 devait alourdir, ne s'appliquera pas dès cette élection ! Hypocrisie sans nom, qui s'ajoute à une triche sur le nombre de candidates : les fameux 30 % de femmes comprennent les candidates et les suppléantes ! Autant dire qu'il y aura encore peu d'élues UMP. Et qu'il continueront à dire qu'ils "ne trouvent pas" de femmes capables de devenir ministres.
À l'UDF on fera forcément mieux que la dernière fois : il y avait beaucoup d'appelés et peu d'élues (2/23 pour 24,9 % de candidates).
Quant au résultat final le 17 juin au soir, il n'est de toute façon pas dans ces chiffres. On comptera les élus et élues, non plus les candidats : s'il y a une quarantaine de députées PS (sur une centaine d'élus espérés), une cinquantaine de députées UMP (sur un contingent annoncé de 400 ) et au mieux la moitié pour le reste de l'Assemblée, ce sera la gloire ! On peut doubler, c'est-à-dire passer de 12,3 % à environ 25 % : loin des 50/50.
De quoi décoller de notre 24e rang / 27 états de l'Union européenne (1er la Suède 47,3 %), et du 88e rang mondial... (1er le Rwanda: 48,8 %)
La France grande nation démocratique ne donne décidément pas l'exemple. À moins que les électeurs ne votent le plus possible pour le PS, puisque c'est là qu'il y a le plus de chance de faire élire des femmes.
Mais les femmes assez âgées pour se rappeler que c'est la gauche qui leur a donné leurs droits, ont voté majoritairement pour Sarkozy : étourdies !
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