Les propositions institutionnelles du Comité Balladur
Fin octobre ont été connues les propositions du « Comité de réflexion et de propositions sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions de la Ve République », plus couramment appelé « Comité Balladur » du nom de l’ancien Premier Ministre qui l’a présidé.
Sur la composition de ce comité, l’on est bien obligé de constater qu’il ne comportait qu’une femme sur treize membres, ce qui ne reflète certes pas la proportion élevée des femmes parmi les spécialistes des questions politiques et constitutionnelles dans notre pays.
Trois séries de dispositions méritent d’être analysées du point de vue de l’AFEM. Il s’agit d’abord des dispositions concernant l’Europe :
1) L’une a pour objet de permettre de ne pas avoir à soumettre à référendum les élargissements de l’Union européenne, qui pourront désormais être approuvées par un vote à la majorité des 3/5 du Parlement réuni en Congrès (article 89 de la Constitution). C’est une simplification évidente, qui, cela dit, fait d’ores et déjà l’objet des critiques de ceux qui estiment que seul le peuple se prononçant par référendum peut consentir la limitation de souveraineté qu’implique tout élargissement.
Les autres propositions tendent à améliorer le contrôle par le Parlement des actes des institutions européennes et aussi à rendre plus facile et plus rapide la transposition des directives en droit français; l’AFEM ne peut qu’approuver le principe de telles dispositions.
2) Représentation proportionnelle et cumul des mandats : on les regroupe parce que ce sont les dispositions sur lesquelles on pouvait le plus compter pour accroître la participation des femmes à la vie politique. Les propositions faites sont assez timides et surtout il apparaît que les chances d’être adoptées sont faibles.
Il s’agirait d’introduire une part de proportionnelle pour assurer la représentation des formations politiques minoritaires, de celles réunissant dans le pays un nombre de voix assez important sans être à même d’avoir des élus dans les circonscriptions. Mais ceci ne porterait que sur un nombre de sièges très limité – vingt à trente – sans qu’ait été encore précisé quelle serait la répartition entre hommes et femmes des candidats à cette désignation à la proportionnelle. Et surtout de nombreuses voix – au sein même de la majorité – se sont élevées contre cette réforme, en insistant sur l’importance essentielle du lien entre un élu et le terrain d’une circonscription.
La proposition qui interdit de cumuler une fonction ministérielle et un mandat électif, sera sans doute acceptée, mais n’entraînera pas un appel d’air susceptible de faire accéder beaucoup de femmes à un mandat électif. En revanche, l’interdiction de tout cumul entre un mandat parlementaire et une fonction exécutive locale, même si elle apparaît très justifiée, aussi bien pour permettre aux parlementaires de se consacrer à leur tâche, que pour favoriser l’accès d’un certain nombre de femmes aux exécutifs locaux, a bien peu de chance d’être adoptée. Elle est d’ores et déjà vivement critiquée et se heurtera à l’opposition vigoureuse de la majorité des sénateurs – pour la plupart élus locaux – et aussi d’un certain nombre de députés-maires : l’obtention au Parlement de la majorité des 3/5 nécessaire à son adhésion, est donc peu probable.
3) Certaines dispositions touchent moins aux institutions et tendent à rendre plus facile aux citoyen(ne)s de défendre et faire valoir leurs droits.
La création d’un défenseur des droits fondamentaux, qui reprendra tout ou partie des attributions d’un certain nombre d’organismes, dont la Halde (Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l’Egalité) pourrait, si le défenseur des droits fondamentaux est à même d’exercer sa mission avec efficacité, faciliter notamment la défense des femmes contre les discriminations fondées sur le genre.
L’extension du contrôle de constitutionnalité proposée par le « Comité Balladur » consiste dans la possibilité, pour les justiciables, de saisir le Conseil constitutionnel par voie d’exception à l’occasion d’un procès devant toute juridiction française ; elle était vivement réclamée par la majorité des spécialistes de libertés publiques. Suffisamment de lois en vigueur peuvent être suspectées de porter atteinte aux droits constitutionnels des femmes pour que l’on doive se réjouir de cette possibilité offerte aux justiciables de saisir le Conseil Constitutionnel, même si celui-ci n’est s’est pas montré jusqu’ici d’un féminisme très audacieux.
Micheline Galabert-Augé - Paris, 5 novembre 2007
Ce texte a été publié dans La Gazette de l'AFEM, disponible auprès de l'association.
Contact : monique.bouaziz2@wanadoo.fr
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