mardi 7 juillet 2009

femmes remarquées

Les cérémonies de décoration se banalisent chez les femmes ! Légion d'honneur et Mérite relèvent maintenant de l'ordre juste de la parité. Il n'était que temps. Et si une décoration ne vaut pas l'égalité, nous sommes dans une période si désespérante que les remises de médailles sont au moins des occasions d'en parler.

On a assez dit que les femmes ne se sentaient pas malheureuses d'avoir été si longtemps oubliées, dans les promotions qui se sont succédé depuis Napoléon et De Gaulle - les créateurs. Pas besoin de hochets. Et ce n'est pas pour autant qu'elles sont restées inactives ; leurs mérites n'étaient pas salués, c'est tout, et elles y survivaient.

Tout un symbole : la plus grande, la plus simple, Simone Veil. C'est tout récemment que l'omniPrésident qui nous gouverne a eu l'attention attirée sur le fait que madame Veil n'avait rien : revers tout nu, pas de médaille, ni Légion, ni Mérite. Problème délicat : comment lui faire monter progressivement les échelons ? chevalière, etc, le symbole même du ridicule pour une personnalité de ce niveau, de ce prestige. Un décret a permis de l'élever d'entrée, à titre exceptionnel, à la dignité de grand officier de la Légion d'honneur : c'était le 1er janvier dernier au J.O. (Pas besoin de signaler qu'aucun homme aussi digne ne s'est trouvé dans la même situation ; ils sont tous pourvus ; le camarade de promotion de Simone Veil, Z. Zidane, était déjà chevalier depuis longtemps...)

De ce fait, passé la phase obligatoire de réception des insignes quatre mois plus tard avec le Président de la République, la nouvelle Grande officière avait enfin le droit de procéder elle-même à des cérémonies équivalentes. Il faut savoir que la personnalité qui décore ne peut remettre de médaille au dessus de son grade ou de sa dignité.

Parmi les premières honorées par Mme Veil, une autre femme à qui les femmes doivent tant : Françoise Gaspard, sans forcément le savoir. Pour ceux qui vont penser
une à droite, une à gauche : petite pause ! Ce n'est pas ainsi que les choses se passent. Si l'on espérait un progrès vers l'égalité femme/homme, tantôt de la droite, tantôt de la gauche, selon qu'elles sont au gouvernement, les Françaises attendraient probablement encore depuis longtemps le droit de vote, et pour longtemps...

C'est seulement par l'intelligence, l'opiniâtreté, la solidarité des femmes entre elles que le progrès arrive - même si elles ne suffisent pas, on le voit trop bien.

Ainsi donc, l'Histoire rappellera que la jeune universitaire Gaspard fut assistante de la nouvelle élue Européenne (et présidente du Parlement). C'est grâce à leur volonté commune que l'Europe confirma un de ses desseins originaux : l'égalité femme/homme du traité de Rome. (De même que le Conseil national de la Résistance avait proné le droit de vote des femmes à la décennie précédente, conduisant au décret de Charles De Gaulle)
C'est alors que l'on vit la naissance de statistiques indispensables pour révéler l'absence des femmes aux responsabilités, c'est alors que l'Europe nomma des "expertes" pour proposer des solutions, etc.

La cérémonie du 11 juin ne fut donc pas qu'une réunion de circonstance. L'amitié régnait ; le respect manifesté par la plus jeune envers son aînée, l'estime réciproque de deux femmes d'iintelligence et de valeur. On rit presque d'avoir entendu Mme Veil admirer l'étendue des diplomes universitaires de sa cadette, elle-même n'ayant "que" une licence et Sciences-Po. (Tout fait leçon : les diplomes sont indispensables aux femmes, et nombre d'entre elles ont su s'en passer.)

Diplomes de la vie, aussi. Simone Veil, dont la vie (et la survie) est un symbole, a été la première à soutenir Françoise Gaspard élue à Dreux, en butte à une formation fasciste. Le courage de chacune, encore. Et leur reconnaissance au delà des frontières, cela va sans dire pour l'aînée, mais aussi l'expertise de la représentation à l'ONU pour la plus jeune.

Les discours de l'une et de l'autre serviront de modèles, de références. Occasions de rappeler des biographies et des faits d'Histoire ignorés, ces discours de rigueur se révèlent pour autre chose que des formules de courtoisie complaisante. Et tous les (heureux) participants à cette soirée se rappelaient les moments de combats féministes et d'échanges communs, toutes considérant que l'œuvre est à poursuivre.



au Sénat, la volonté de parité

Déjà le 28 mars dans le cadre d'un colloque organisé par Elles aussi, l'occasion avait été saisie par Michèle André, présidente de la Délégation sénatoriale aux droits des femmes et à l'égalité (...).
C'est elle qui remit sa médaille de chevalière de la Légion d'honneur à Sylvie Ulrich : toutes deux payses de leur chère Auvergne, elles surent profiter de cette cérémonie pour rappeler l'histoire du combat des femmes et de la parité.

Au point que des participantes au colloque, qui ne connaissaient pas personnellement la responsable associative (ancienne présidente de l'UFCS et de l'européenne AFEM), sont restées pour écouter ce qu'elles ont découvert comme un cours passionnant sur l'histoire des femmes. Et qu'elles jugeaient indispensable à leur formation ! (espérons que les futurs Actes de ce colloque incluront les deux allocutions)

à l'Ouest, la parité encore

Cette fois c'est à Quimper, à l'hôtel du département mais dans un air iodé de début de vacances, que la dernière cérémonie a eu lieu. Pour faire
Annette Vazel chevalière de la Légion d'honneur, une autre grande dame, Michelle Perrot, avait accepté de faire le voyage au pays de Rien sans elles, association créée par Annette.

Foin des tralalas,
la présidente d'Elles aussi n'est pas du genre à chercher les décorations ! mais elle a bien dû voir qu'il lui était impossible de fuir les pressions de tous côtés... Elle a compris le sens de solidarité qui permet à chaque militante décorée de rappeler la cause qu'elle soutient.

De sorte que toutes les participantes, restées en Cornouaille ou revenues à Paris et dans leurs régions, expriment finalement le même sentiment partagé : sympathie et émotion. Pas de doute, il ne faut donc pas se priver de pareilles occasions !

Un lien entre tous ces moments rituels : l'Histoire. Ce n'est pas par hasard que Michelle Perrot a fait le voyage de Bretagne. L'illustre universitaire, pionnière de l'histoire des femmes et du genre, est aussi une militante. Et elle a salué la militante qu'est Annette Vazel, décorée à ce titre, mais aussi pour sa carrière universitaire (à Brest).

L'histoire de la parité n'est encore qu'à ses débuts.
On a encore peu avancé, et fanchon-la-parité a cette seule justification d'existence : la parité n'est toujours pas acquise, tant que les partis politiques la traiteront d'objectif et de contrainte (avant chaque élection)...


Mais la parité n'aurait même pas commencé d'exister comme objectif sans les associations féministes, sans les universitaires qui ont fait avancer les études de genre, et bien sûr sans les politiques... enfin : certain-e-s.
Des carrières universitaires se sont même dessinées sur les bancs (du public !) entre 1999 et 2000, au côté des militantes associatives pendant les débats parlementaires (jusqu'à pas d'heure dans la nuit, parfois).
N'oublions pas le rôle aussi actif que moqueur des dessins de Catherine ! pour lire en vacances, rien de tel.

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3 commentaires:

  1. eh ben quelle documentation cet article ! J'ai été ravie de voir le site "rien sans elles" se monter, c'est un livre qui porte ce titre et ce sont les mêmes femmes (brestoises) ... j'avais adoré ce bouquin sur la politique, et les petits dessins qui illustrent ce bouquin ont été pour beaucoup dans ma volonté de faire de petites illustrations moi aussi, sur le thème féministe ;o) j'ai hâte que leur site ou blog démarre ^^

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  2. Bonjour,

    Serait-il possible de connaître les noms des personnes présentes sur le photomontage réunissant Françoise Gaspard et Simone Veil ? Merci d'avance ! Karine D.

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  3. @ Karine : parmi les invités (privés) vous avez sans doute reconnu des femmes que les médias ne nous montrent pas souvent ?!
    merci d'envoyer votre adresse @ (elle ne sera pas publiée), pour la réponse..

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