jeudi 2 août 2007

binaire


Oh, le mec ! journaliste-présentateur d'i-télé, "recevant" ce matin Annick Lepetit, députée PS qui vient de passer une grande partie de la nuit à l'Assemblée. Le sujet : vote du projet de loi "en urgence" sur le service minimum dans les transports terrestres. (Prend-il seulement un train de banlieue ?)

Pied à pied, Aymeric fonce courageusement. Son objectif : obliger la députée à dire pourquoi elle est contre cette loi ; l'obliger à dire si "oui ou non" elle est pour un service minimum dans d'autres domaines de service public (l'école, l'hôpital, par exemple) ; l'obliger à dire que le PS est "pour ou contre" l'ouverture des grandes surfaces le dimanche.

La socialiste aura beau essayer de le faire sortir de son cadre limité, lui démontrer qu'une loi n'est pas la réponse au problème posé - lui, il revient à son petit cadre "oui, mais concrètement" (car elle n'est pas concrète ?), "mais les sondages". Sourit, mais n'écoute pas vraiment, seulement occupé à la faire céder, ou à démontrer que le PS et sa députée n'ont pas d'idée, ne font que de l'obstruction. Aucune considération pour ses arguments.


A. Lepetit répète que le gouvernement légifère pour répondre à seulement 2 % des problèmes des usagers des transports. On sait que - dans 98 % des cas où le train ne part pas - il s'agit de pannes techniques : locomotives, matériel vétustes. Cette loi ne changera rien à 98 % des problèmes. Quant aux 2 % qui restent, on a vu se réduire considérablement le nombre des grandes grèves. Il dépend des rapports sociaux dans les entreprises. On constate par exemple qu'Anne-Marie Idrac a su aménager comme présidente de la RATP, puis aujourd'hui de la SNCF, un autre mode de dialogue avec les personnels et les syndicats, pour prévenir les conflits.

Problème avec Idrac ; c'est une femme de caractère, et elle a été députée de Bayrou (1997-2002) - soutenant aussi la parité. On murmure dans les milieux autorisés (comme disait Coluche) que le gouvernement veut sa peau... Peu importe la qualité de son travail - elles sont tellement rares, les femmes à la tête d'une telle entreprise ! Et celle-là personne ne peut lui contester sa compétence à l'Équipement, dans les Transports : elle y a été haute-fonctionnaire, puis ministre - et même "juppette" ! On lui doit dans les deux sociétés des réformes appréciables.

Tout cela n'aurait pas intéressé le journaliste. Il se moque bien du retard des investissements de l'État à la SNCF. Ce qui l'intéresse : les sondages que Sarko-Fillon-Bertrand prennent comme prétexte pour leur loi au 1er août.
Quant au service minimum, Annick Lepetit reprend naturellement l'idée des négociations sociales qui sont tout de même la base de la démocratie.
Même chose pour l'ouverture des commerces le dimanche, controverse basée sur des intérêts divergents : problème social que le PS n'accepte pas de voir réduire à une question économico-libérale. Pas plus que la majorité de droite, le PS n'a à imposer une position idéologique. Le repos des salarié-e-s doit être pris en cause : ce sont déjà les plus mal traité-e-s de toutes les catégories d'emploi. Et il faut des négociations dans tous ces domaines, comme Ségolène Royal s'y était engagée si elle était élue. Logique.

Pour le journaliste, le PS n'a pas de proposition : il renvoie toujours au dialogue social. Eh bien oui, parfois. Où est la honte ?

Voilà à quoi des journalistes se retrouvent réduits, dans l'air de ce temps. La pensée binaire : oui/non, pour/contre. Surtout pas de nuances.
Normal, quand on voit le ministre du Travail, des Relations sociales et de la Solidarité (eh si !!) mais aussi du logement, de l'urbanisme, de l'équipement, des transports, de l'aviation, du tourisme : Xavier Bertrand, stéréotype du genre, révulsif, mais écouté benoîtement par les "journalistes" qui ne prennent pas le même ton qu'avec Annick Lepetit....
Sourire RPR-UMP et bulldozer : la voix de son maître, pas d'états d'âme, les Français ont été sondés, ils ont voté pour son maître. Donc on vote, pendant les vacances, ce que son maître avait annoncé pendant sa campagne. Que tout soit bouclé à la rentrée quand les Français reviendront.

Et là, on verra les effets de la pensée binaire : le matin où la loco aura sa 18000ème panne, à quoi aura servi la loi votée à la sauvette ?
Et quand les patients verront que le remboursement de leur ordonnance n'est plus ce qu'il était, ils se demanderont en quoi la loi de juillet 2007, qui les appauvrit, va compenser les 13 milliards de cadeaux fiscaux aux plus riches. Là, ils seront peut-être "pour"ou "contre"...

Et quand un journaliste n'aura plus qu'à demander oui / non, on pourra le remplacer par un robot ?

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